“C’est pour de vrai – 7”
Le 2 janvier 2024.
Une journée censée se dérouler de la meilleure des manières.
Ma petite dernière, Nyéléni, 2 ans, devait assister pour la première fois à un spectacle pour petits, accompagnée de Nora, ma fille de 13 ans.
Impossible de raconter en détail, sur une publication Instagram, le déroulement des événements.
Partir à un spectacle avec ses enfants, en toute légèreté, sans anticiper ou penser une seconde aux éventuelles problématiques que je pourrais rencontrer (culpabilité ?).
Partir à un spectacle et se retrouver accusée d’avoir forcé la porte du théâtre pour assister à un spectacle pour enfants.
Partir à un spectacle et s’entendre dire qu’on est hautaine parce qu’on refuse catégoriquement l’accusation, parce qu’on refuse de se laisser humilier devant ses enfants.
Dénoncer cette situation et avoir pour retour la confirmation de l’accusation, mais surtout du risque d’être attaquée pour diffamation pour avoir demandé si tous les clients retardataires étaient accusés d’avoir forcé la porte ou seulement les clients qui me ressemblent.
J’ignore ce qui est le plus dur à encaisser, l’injustice d’être accusée à tort, l’incompréhension constatée sur le visage de ma fille de 13 ans, mon impuissance face à cette humiliation en présence de mes 2 enfants.
Je ne saurai jamais avec certitude ce qui a motivé cet homme à m’accuser avec autant de conviction et de véhémence.
Je ne sais pas si je pourrais à nouveau assister à un spectacle, avec ou sans mes enfants, sans penser à cet événement, et sans me sentir « pas à ma place ».
Ce que je mesure plus que jamais, c’est le poids de la charge raciale de n’importe quelle personne racisée qui pourrait se retrouver dans la même situation.
Ce que je mesure plus que jamais, c’est qu’il y a des lieux où nous ne sommes pas censés nous trouver, des lieux dans lesquels nous ne devons jamais, jamais, baisser la garde.
Ce n’est pas de la victimisation, c’est un constat.
Je ne saurai jamais avec certitude. Pourtant, cette histoire s’inscrit dans la continuité de beaucoup d’autres, gravées à jamais en moi.
Aouicha Traoré